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A non-government information service on Turkey
Un service d'information non-gouvernemental sur la Turquie


136

12e année - N°136
Février 1988
38 rue des Eburons - 1000 Bruxelles
Tél: (32-2) 215 35 76 - Fax: (32-2) 215 58 60
 Rédacteur en chef: Dogan Özgüden - Editrice responsable: Inci Tugsavul
 
NOUVELLES CONCESSIONS D'OZAL A WASHINGTON

    Dans une démarche surprise, le gouvernement Özal a avalisé, le 28 février 1988, la lettre d'intention reconduisant l'Accord de Coopération Economique et de Défense (DECA) avec les Etats Unis pour une nouvelle période de cinq ans.
    La Turquie avait annoncé en avril de l'année passée qu'elle n'allait pas ratifier la lettre d'intention à cause du fait que les Etats Unis ne respectaient pas leurs engagements envers la Turquie. Ankara avait maintes fois protesté contre les coupures dans l'aide économique et militaire américaine à la Turquie et la discussion au Congrès américain d'un avis qui visait à commémorer l'anniversaire du massacre des Arméniens au tournant du siècle.
    La ratification de la lettre d'intention a fait l'effet d'une surprise pour les observateurs politiques à Ankara, du fait qu'il n'y avait aucune amélioration perceptible des relations avec Washington.
    En plus de cela, comme autre geste de concession à Washington, le "Président de la république",  le général Kenan Evren, a annoncé qu'il effectuerait une visite aux Etats Unis au mois de juin 1988. Cette visite d'abord prévue pour 1987 avait été suspendue en marque de protestation contre la discussion sur le génocide arménien au Congrès américain.
    Selon le quotidien Hürriyet du 29 février, en signant la lettre d'intention, le gouvernement turc avait accordé à Washington les avantages suivantes:
    1. Les Etats Unis pourront renouveler et moderniser les bases de contrôle de Pirinclik, Sinop et Belbasi. Ces trois stations ont une grande importance pour le contrôle des tests d'armements en Union soviétique.
    2. Washington est autorisé à accélérer les nouveaux travaux de construction dans certaines bases aériennes importantes telles que celle d'Incirlik.
    3. La force aérienne américaine pourrait augmenter le nombre de ses avions de combat F-16 de 36 à 48. De cette façon, les F-16 américains chassés par le gouvernement espagnol doivent être basées en Turquie.
    L'ancien ministre des affaires étrangères Hasan Esat Isik, décrivant la ratification comme un fiasco diplomatique, a dit que le défaut principal de la DECA réside dans le fait que la Turquie s'est pleinement impliquée en tant que pays alors que les Etats Unis ne se sont engagés qu'à remplir certaines promesses.
    Dans une démarche parallèle, le chef d'Etat-major le général Necip Torumtay a annoncé une décision d'organiser des manoeuvres navales conjointes avec la force navale égyptienne. Les manoeuvres doivent avoir lieu cette fois dans l'est méditerranéen.
    Réagissant contre ce nouvel engagement militaire, les porte-paroles de l'opposition ont dit que la Turquie pourraient se trouver trop profondément impliquée dans les conflits militaires de la méditerranée.
    En fait, le 16 février, le quotidien Cumhuriyet a rapporté que certaines entreprises turques et israéliennes avaient des discussions en vue de co-produire des pistolets à longue portée et des avions de combat Phantom F-4 .
    Le journal britannique Independent du 20 février ont rapporté que les gouvernements de Turquie et d'Arabie saoudite avaient eu cinq fois des pourparlers, à différents moments, en vue d'installer 16.000 soldats turcs sur le territoire saoudien, de remplir le manque laissé après que les soldats pakistanais se soient retirés de ce pays.
    C'est après avoir pris toutes ces nouvelles mesures pro-américaines que le premier ministre Özal a lancé sa soi-disant "offensive de paix" vers les pays socialistes, les pays européens et ceux du moyen-orient.
    Sa visite à Téhéran  -la troisième en Iran depuis qu'il est devenu premier ministre en 1983- était un mélange de succès et d'absence de compromis. Les deux nuits du séjour d'Özal à Téhéran furent particulièrement bruyantes, pendant que les avions irakiens commençaient à bombarder la capitale iranienne. Le missile et l'attaque aérienne irakiennes avaient pris Ankara par surprise.
    Le succès était qu'Özal devenait le premier dignitaire étranger à être personnellement accueilli par l'ayatollah Montazeri, l'homme désigné par l'ayatollah Khomeiny pour lui succéder. Néanmoins, en dépit de toute la pompe accordée à Özal, les discussions entre les délégations turque et iranienne centrées sur des sujets économiques n'ont pas été entièrement un succès. Aucun accord n'a été conclu sur le projet des pipeline qui feront la connexion entre les champs pétrolifères iraniens et la côte méditerranéenne sur le territoire turc.
     Après Téhéran, Özal s'est rendu à Bruxelles et à parlé au sommet de l'OTAN en tant que quatrième leader de l'OTAN après Reagan, Mitterand et Kohl. "La modernisation des armes nucléaires tactiques devrait être évaluée dans le cadre d'une période de temps raisonnable, prenant aussi en considération l'attitude que manifestera l'Union soviétique dans les négociations pour le contrôle des armes nucléaires et conventionnelles," a-t-il dit. La presse a commenté cette déclaration comme un signe que la Turquie se range aux côtés des membres européens de l'OTAN, qui montrent une certaine répugnance à déployer de nouvelles armes nucléaires.
    Cependant, après la ratification de la DECA pour cinq nouvelles années et les révélations sur les pourparlers de la Turquie avec l'Egypte, Israël et l'Arabie saoudite dans le cadre des plans de Washington, ces déclarations "de réserve" d'Özal devant les alliés européens n'étaient qu'une manoeuvre à double face ayant pour but d'obtenir plus de soutien pour l'amélioration des relations turco-européennes.


LE RAPPORT DU DEPARTEMENT D'ETAT AMERICAIN SUR LS DROITS DE L'HOMME EN TURQUIE

    Alors qu'elle était en train de faire des nouvelles concessions aux Etats Unis, l'administration Özal a été plutôt agacée par les rapports de presse rendant publics des extraits du rapport annuel du Département d'état américain sur la situation des droits de l'homme.
    Quoique libellé dans un esprit de tolérance envers l'allié le plus loyal des Etats Unis, ce rapport adressé au Congrès américain contient de nombreuses  remarques et commentaires critiques sur le régime du tandem Evren-Özal.
    En particulier, la section sur les "minorités" en Turquie a donné lieu à de violentes accusations contre les Etats Unis dans les milieux politiques turcs.
    Nous reproduisons ci-dessous le texte intégral de ce rapport controversé:

    Section 1

    Respect pour l'intégrité de la personne,  incluant les libertés de:

    A. Meurtres politiques.
    Il n'y a eu aucune accusation de meurtres pour motif politique par les forces gouvernementales en 1987. Un attentat à la bombe à Istanbul en octobre a tué une personne. Une attaque d'un poste de police en août à Istanbul a également causé la mort d'un policier.
    B. Disparitions
    Il n'y a eu aucune disparition connue dont les forces gouvernementales se seraient rendues  coupables.
    C. Torture et autres punitions ou traitements cruels, inhumains ou dégradants:
    En janvier 1988, la Turquie a signé la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants, et annoncé son intention de signer un Accord similaire des Nations Unies. L'adhésion à la Convention du Conseil de l'Europe autorise un comité international des pays membres du Conseil de l'Europe à visiter tous les lieux de détention (postes de police, prisons civiles et militaires, et hôpitaux psychiatriques) à n'importe quel moment, après notification de la visite au gouvernement de Turquie. En annonçant son intention de signer la convention, le gouvernement a manifesté la sincérité de la volonté de la Turquie pour abolir la torture.
    Bien que la Constitution affirme que "personne ne sera soumis à la torture ou à des mauvais traitements incompatibles avec la dignité humaine," des hommes politiques turcs, la presse turque, et des groupes de pression à l'extérieur ont assurés de façon répétée que les prisonniers sont soumis aux mauvais traitements et à la torture au cours de l'interrogatoire initial ou de l'emprisonnement. Dans son dossier de septembre 1987 sur la torture, Amnesty International a fait l'accusé la torture d'être "répandue" et "systématique," déclarant que "près de 4 ans après qu'un gouvernement civil fut  arrivé au pouvoir en novembre 1983, aucune mesure effective n'a été prise pour empêcher la torture." Le dossier d'Amnesty contenait des compte-rendus sur les méthodes de torture, les centres de torture, les abus sexuels, et la mort en détention. Helsinki Watch concluait dans son dernier rapport que "la torture est toujours en pratique en Turquie sur une large échelle." Il affirmait aussi, cependant, que les mauvais traitements ou la torture en prison, à part pour la période de détention initiale, a décru de façon substantielle.
    Certains témoignages de torture concernent des traitements qu'on pourrait définir comme brutalité policière, telles que la manipulation brutale par des officiers de police dans le but d'intimider un suspect ou un prisonnier ou due à une animosité personnelle. Dans d'autres cas les mauvais traitements paraissent impliquer la torture systématique. Presque tous les nombreux témoignages concernent  les traitements durant la période de détention incommunicado, avant que les accusations soient réunies en dossier et avant que l'accusé soit en mesure de contacter un avocat. Beaucoup de cas sont  attestés par des preuves médicales. Une plus liberté de la presse a conduit à une couverture générale de ces cas de torture en Turquie, incluant photos des victimes, descriptions des méthodes, et croquis des locaux où on affirme que la torture a eu lieu.
    Déjà avant de signer la Convention du Conseil de l'Europe, le gouvernement avait condamné la torture et exprimé sa détermination à la supprimer par la punition rapide et sévère des coupables. Suite aux élections de novembre, le directeur général de la sûreté nouvellement désigné, qui joue le rôle de chef de la police nationale turque, a condamné sans appel la pratique de la torture et s'est engagé à l'abolir. Le gouvernement a fait des efforts pour enquêter sur les témoignages de torture et poursuivre les coupables. Bien que des chiffres précis pour le nombres des enquêtes et des poursuites ne soient pas disponibles, la presse continue de rapporter des cas de punition de personnes coupables de torture. Par exemple, en octobre, suite à la conclusion d'une équipe médicale judiciaire d'après laquelle un prisonnier à Bingol était mort suite à la torture, le gouvernement a lancé un procès contre un certain nombre de membres de personnel militaire, y compris un officier. Ce même officier a été par la suite reconnu coupable de torture dans une affaire différente. Néanmoins, les organisations internationales des droits de l'homme continuent de maintenir que beaucoup de témoignages de  torture ne sont pas complètement investigués et que certains individus reconnus coupables continuent de mener leurs activités officielles alors même que leur affaire et en appel.
    Les défenseurs des droits de l'homme aussi bien en dehors qu'à l'extérieur de la Turquie, y compris l'Union des Barreaux Turcs, ont suggéré que le moyen le plus efficace d'empêcher la torture est de permettre aux avocats l'accès aux prisonniers au cours de la période initiale de détention. Un tel accès est actuellement pris en considération parmi les révisions proposées pour le Code criminel. Ce code criminel, si adopté, augmenterait également les peines pour la torture. Le code criminel actuel catégorise le meurtre par torture comme assassinat et le punit d'une peine de 8 ans. Les punitions pour la torture qui ne cause pas la mort vont de 3 à 5 ans. En 1986, le parlement a rejeté une motion qui aurait relevé ces peines à 5 à 10 ans. Le nouveau code criminel augmenterait la peine pour meurtre par torture jusqu'à un maximum de 16 ans.
    En août, suite à un large mouvement de grèves de la faim par les prisonniers, accompagné de manifestations en dehors des prisons par leurs parents et amis, les journalistes turcs ont été autorisés pour la première fois à visiter les prisons et à décrire de façon complète les conditions d'emprisonnement. Suite à cette attention portée par la presse, les conditions semblent s'être améliorées dans beaucoup de prison. Le gouvernement a répondu à de nombreuses demandes de prisonniers et s'est lancé dans la construction de nouvelles prisons afin d'améliorer les conditions de vie. Le ministre de la justice a déclaré en septembre que les conditions d'emprisonnements s'étaient améliorées de façon radicale au cours des 3 dernières années avec la mise sur place de nouveaux lieux de détention. Cependant, à cause de son relatif sous-développement, la plupart des établissements publics en Turquie, y compris les prisons, sont encore au dessous des standards en comparaison avec ceux de beaucoup de pays développés.
    D. Arrestations arbitraire, détention, exil, ou travail forcé
    Sauf dans des circonstances particulières , comme le fait qu'une personne soit prise sur le fait en commettant un crime, un juge doit délivrer un mandat d'arrêt au procureur pour qu'un prisonnier soit incarcéré. La police ou le procureur public peut cependant maintenir les personnes mises en détention incommunicado et sans accusation pendant 24 heures. Par ordre de la cour, la période de détention incommunicado peut être étendue à 15 jours. Dans des affaires de "délits commis collectivement" par trois personnes ou plus, la détention sans accusation jusqu'à 15 jours est permise sans ordonnance de la cour.
    Dans les neuf provinces sous l'état d'urgence, le gouverneur (ou le gouverneur supérieur) peut autoriser la détention d'une personne jusqu'à 30 jours sans inculpation. Sous la juridiction de l'état d'urgence, les autorités n'ont pas besoin de mandats pour détenir les suspects. Une fois en détention normale, un détenu est amené devant un procureur public pour être informé des charges qui pèsent sur lui. Si le procureur décide de donner suite à l'affaire, le détenu est déféré devant un juge et autorisé en conséquence à obtenir un avocat.
    Le parlement a rejeté en 1980 une motion demandant l'accès immédiat à un avocat. Une révision proposée du code criminel selon laquelle une personne, étant détenue, devrait avoir droit à obtenir un avocat est toujours en discussion. Un détenu n'a pas droit à une caution; le juge désigné, cependant peut relâcher l'accusé en liberté provisoire sur présentation d'une garantie adéquate, ou ordonner de le maintenir en détention préventive si la cour conclut qu'il pourrait fuir ou détruire des preuves. La constitution stipule le droit des détenus à demander une décision rapide pour l'assignation et le procès. Dans tous les cas, les autorités peuvent maintenir un détenu incommunicado dans les limites prescrites jusqu'à ce qu'il soit accusé ou relâché. D'après l'acte des forces de police de 1975, la famille d'un détenu doit normalement être avertie "dans le plus court délai."
    Le 15 avril, le parlement a fait passer une loi qui a abrogé la mesure de l'acte d'exécution des sentences de 1986 qui permettait aux autorités judiciaires turques d'imposer des sentences d'"observation de sécurité", communément appelées exil interne.
    La constitution interdit le travail forcé, et cette pratique n'a pas cours.
    F. Refus d'un procès équitable
    Les inculpés ont en principe droit à un procès public. Pour certains procès, tels que ceux tenus dans des prisons militaires ou dans un complexe militaire, les membres du public doivent demander la permission pour assister. Mais cette permission est accordée de routine. Bien que la Turquie soit à dominance islamique, les structures de la cour et les procédures judiciaires sont sur le modèle des codes de loi italien (criminel) et suisse (civil). Comme dans beaucoup d'autres pays à loi civile, les procès dans lesquels des jurys populaires rendent des verdicts ne font pas partie du système judiciaire turc.
    La constitution déclare que les juges seront indépendants dans l'exercice de leurs devoirs et leur accord la sécurité de l'emploi. Elle interdit également aux autorités de donner des ordres ou des recommandations aux juges en ce qui concerne l'exercice du pouvoir judiciaire. L'indépendance de la justice a été démontrée lorsque la cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnelles deux mesures de l'Acte des Forces de Police de 1985 qui étaient généralement considérées  comme oppressives. Les cours ont également acquitté de nombreux inculpés dans des affaires impliquant la liberté d'expression.
    Les procureurs de la République sont également indépendants; la poursuite  d'un affaire est leur décision propre. C'est eux qui déterminent s'il faut poursuivre les enquêtes sur les témoignages de torture. Le Conseil Suprême des Juges et les Procureurs de la République, désignés par le Président de la République et incluant le ministre de la justice, sélectionne les juges et les procureurs pour les hautes cours et supervise ceux des cours inférieures.
    Tous les inculpés accusés de terrorisme ou d'autres délits contre la sûreté de l'Etat, y compris le trafic de la drogue, sont jugés devant une des huit cours de la sûreté de l'Etat. Les juges dans ces cours observent les mêmes standards en ce qui concerne les preuves, que les juges présidant des cours civiles régulières. Trois juges président la cour de sûreté de l'Etat: un juge civil comme président, un juge civil additionnel, et un juge militaire. Les cours civiles et celle de la sûreté conduisent en général les procès en suivant les même règles de procédure, basée sur la Constitution et les règlements de loi de l'état d'urgence.
    La reconnaissance de culpabilité ou l'acquittement dans les deux systèmes peuvent aller en appel. Si une cour d'appel rejette le verdict de culpabilité d'une cour inférieur, l'affaire est renvoyée devant la cour inférieure pour être reconsidérée. Si la cour inférieure insiste sur son premier verdict, l'affaire retourne en cour d'appel pour avis. Dans certains cas, en particulier pour la peine capitale, les appels devant la Cour Suprême ou devant la Haute Cour Militaire d'Appel sont obligatoires et automatiques. Si une sentence capitale est confirmée par la cour d'appel, elle doit être approuvée par le conseil des ministres, ensuite par le parlement, et finalement par le président de la République.
    Les témoignages disponibles suggèrent que les inculpés de langue kurde qui sont jugés dans le sud-est souffrent souvent d'un manque partiel, ou dans certains cas total, de familiarité avec la langue turque, la langue officielle et la seule permise dans la communication avec les avocats ou les représentants de la justice. Bien que des traducteurs soient permis, la qualité des traductions du kurde en turc est pauvre d'après les rapports.
    Les estimations du nombre de prisonniers politiques détenus dans les prisons turques varient beaucoup, d'après la source et la définition de la source de ce qu'est un prisonnier politique. Le gouvernement nie qu'il détienne aucun prisonnier politique mais fait observer que de nombreuses personnes ont été emprisonnées pour actes terroristes ou pour d'autres crimes commis dans la poursuite d'objectifs à caractère ostensiblement politique au cours des années 1970. Les organisations des droits de l'homme pensent que beaucoup de gens ont été emprisonnés sous des statuts  proscrivant le fait d'"être membre d'organisations illégales", interdisant la propagande ayant pour but de promouvoir l'hégémonie d'une classe ou d'un groupe ethnique, ou défendant l'établissement d'un état islamique. Ils estiment que les personnes couramment emprisonnés pour activité non violente sous ces statuts se chiffrent par plusieurs centaines.
    F. Intervention arbitraire sur la vie privée, la famille, le domicile ou la correspondance:
    La constitution assure l'inviolabilité du domicile  de la personne et de la vie privée, de la correspondance et des communications. L'entrée de représentants du gouvernement dans des résidences privées et l'interception ou le contrôle de la correspondance sont autorisés seulement avec un mandat judiciaire.
    Dans les neuf provinces qui sont toujours sous l'état d'urgence, cependant, le gouverneur (ou le gouverneur supérieur) peut requérir les autorités pour rechercher les résidences ou les locaux de partis politiques, d'entreprises, d'associations, et d'autres organisations sans obtenir de mandat. Ils peuvent aussi rechercher, détenir, ou saisir sans mandat des personnes, des lettres, des télégrammes, et des documents.
    G. Violations de lois humanitaires lors de conflits armés:
    Depuis août 1984, le gouvernement a fait face dans le sud-est de la Turquie à une campagne croissante de violence sanglante menée par des groupes de guérilla kurde qui résident en Turquie  et dans plusieurs pays avoisinants, lesquels ont entrepris d'établir un état kurde indépendant --incluant des parties de la Turquie, de l'Irak et de l'Iran-- en déstabilisant le gouvernement central turc. Les rebelles armés kurdes en Turquie reçoivent un soutien et du matériel substantiels de l'extérieur.
    Les attaques de la guérilla semblent avoir augmenté à la fois par leur nombre et leur extension géographique en 1987. Des changements récents dans la tactique de guérilla incluent la formation de bandes plus grandes pour des attaques armées, des grèves dans l'infrastructure  économique et des transports de la région, et les massacres brutaux dans le mode terroriste de paysans, dont beaucoup des victimes sont des femmes et des enfants.
    Les attaques des supporters du Parti ouvrier kurde d'orientation marxiste (PKK), le principal groupe insurgé, contre des cibles civiles ou gouvernementales ont causé la mort d'au moins 500 civils et militaires. Un journal turc a rapporté en juillet un bilan de 3 ans de 715 tués, dont 289 étaient des civils, pour la plupart des femmes et des enfants, 159 militaires, et 267  combattants de la guérilla. Il y a eu des d'autres assassinats, en particulier de civils, depuis lors.  Malgré des opérations militaires importantes contre le PKK, les activités de la guérilla continuent dans beaucoup de  régions éloignées et relativement inaccessibles du sud-est.
    Les membres turcs du parlement, des groupes internationaux de protection des droits de l'homme, et la presse turque ont soulevé des questions concernant les activités des forces de sécurité dans la Turquie du sud-est. Selon les rapports, les membres de la famille de terroristes suspectés ont été maltraités ou torturés pour obtenir des informations sur la situation des terroristes. Dans certains cas, les populations de villages entiers ont été questionnés ou même détenus. Dans d'autres cas, des villageois suspectés de fournir de la nourriture aux terroristes ont été accusés d'aider les séparatistes.

    Section 2

    Respect des libertés   civiles, incluant:

    A. liberté de parole et liberté de la presse:
    Les développements politiques et les règlements de justice ont éliminé la plupart des restrictions de la liberté de la presse. Le code criminel, néanmoins, interdit les discours ou écrits considérés comme menaçant la sécurité de l'état et le système démocratique de gouvernement. L'interdiction s'applique à la propagande pour la domination de classe ou de race (communisme et  fascisme), l'établissement d'un état théocratique (intégrisme islamique), ou la création d'un état séparé sur base ethnique (séparatisme kurde). Ces mesures sont en vigueur depuis longtemps, datant des premiers jours de la République turque.
    La presse turque est robuste et vigoureuse. Elle appartient à des groupes privés et reflète un  vaste étendue de points de vue politiques. Il n'y a pas de journal "gouvernemental"; à un  degré  plus ou moins grand, tous les journaux présentent les points de l'opposition. De plus, la tendance récente des règlements de justice affectant la liberté de la presse a été en faveur de plus de liberté, de façon consistante, en dépit des restrictions statutaires encore existantes. Néanmoins, la possibilité de poursuite induit probablement une certaine prudence de la presse dans sa sélection des sujets choisis pour les  reportages.
    La Radio télévision turque (TRT) est un monopole du gouvernement. Les leaders de l'opposition se plaignent du fait qu'elle est orientée favorablement au gouvernement dans sa couverture des faits, bien que tous les partis aient été autorisés à présenter leurs points de vue au cours de la campagne électorale de novembre. Les oeuvres de certaines personnalités de gauche et des interprètes et écrivains turcs sont, d'après des rapports fiables, interdites  des émissions de la TRT pour  raisons politiques ou culturelles.
    B. Liberté  de rassemblement pacifique et d'association:
    Les rassemblements pacifiques sont autorisés avec la permission préalable des autorités. Ces requêtes sont généralement accordées. Suivant les règlements actuels, les trajets des marches, les lieux de rassemblement, les chemins de dispersion de la foule, et les endroits où seront attachées les affiches doivent être fixés dans toutes les villes chaque janvier. Le gouvernement a autorisé les manifestations politiques au cours de la campagne pour le référendum et n'a pas interféré avec la campagne politique pour les élections parlementaires.
    La loi sur les associations, qui reflètent la préoccupation du gouvernement en ce qui concerne l'implication de certaines associations dans la violence politique qui a précédé l'opération militaire de 1980, interdit aux associations d'avoir des liens avec des partis politiques ou engagés dans des activités politiques.
    Les activités d'association sont contrôlées de près par le gouvernement. Les associations doivent soumettre leurs programmes pour approbation par les autorités avant que leur formation soit autorisée. Les associations turques des droits de l'homme, formées en juillet 1986, n'ont pas reçu  la permission d'agir en tant qu'association légale avant un an, bien qu'elles pouvaient tenir des meetings et séminaires dans l'intervalle.
    En réaction à l'implication des universités dans la violence d'avant 1980, la constitution et la loi des partis politiques proscrivent l'implication des étudiant et des facultés dans les activités politiques. Les partis politiques ne peuvent constituer de mouvement de jeunesse. Les étudiants doivent obtenir la permission du recteur de leur université avant de pouvoir former une association. Suite aux protestations des étudiants, le gouvernement a retiré  en avril un amendement proposé à l'acte de l'éducation supérieure qui aurait limité les associations étudiantes à une par campus universitaire. Néanmoins, 143 étudiants qui protestaient contre le projet de loi ont été traduits en procès pour rassemblement illégal. Ce procès est toujours en cours. Sur les 100 membres de facultés environs qui ont été  renvoyés sous les règlements de la loi martiale -- de même que 1.000 membres ont donné eux-mêmes leur démission soit par désaccord avec l'intervention militaire ou pour d'autres raisons, principalement économiques-- un certain nombre ont écrit des requêtes pour leur réintégration, et au moins un professeur a été réintégré suite à une décision de la cour en sa faveur.
    Le fait d'être membre d'une organisation défendant l'instauration d'un système d'un gouvernement basée sur les classes sociales (organisation communiste) ou de participer à des activités qui y sont reliées est illégal sous la loi turque. Les autorités ont arrêté des personnes en octobre et les ont traduites en justice sur l'accusation d'être des membres actifs de l'Union Révolutionnaire du Peuple, qui est considérée comme une organisation de ce type.
    Les syndicats et confédérations qui continuaient d'opérer dans le cadre des mesures de la loi sur le travail de 1983 ont été autorisés à organiser librement des lieux de travail et à conclure des conventions collectives. Bien qu'un faible pourcentage seulement de la force de travail turque comptant quelque 16 millions de travailleurs soit organisée, plus de 60% des ouvriers d'industrie sont membres d'unions couvertes par des accords de conventions collective. Il s'ensuit que les syndicats ont un impact significatif sur l'économie, spécialement sur les règlements de travail et la structure salariale. La loi de 1983 sur les conventions collectives, grèves et fermetures d'entreprises règlemente de façon stricte le processus de négociations et rend illégales les grèves en dehors de ce processus (grèves générales, grèves politiques, et grèves de solidarité). Les unions sont habilitées à représenter leurs membres, à conclure des conventions collectives, et à protéger les intérêts de leurs membres.
    Sous la loi martiale, les activités des syndicats et des confédérations ont été sévèrement restreintes.
    Malgré la levée de la loi martiale, l'activité politique des syndicats est interdite par la constitution, la loi sur les associations, et la loi sur les syndicats... Les syndicats ne peuvent théoriquement ni appuyer des candidats ou des partis, ni contribuer à leurs campagnes. Néanmoins, la Confédération des syndicats turcs, TURK-IS, a ouvertement fait campagne contre le parti dirigeant de la Mère Patrie, aussi bien au cours de la campagne pour les élections partielles de 1986 que pour les élections parlementaires de 1987. L'activité des syndicats en faveur des intérêts sociaux et économiques des travailleurs n'est pas considérée comme activité politique. Les syndicats ont tiré avantage de cette distinction pour organiser des campagnes publiques très engagées contre diverses mesures du gouvernement et pour faire pression sur les parlementaires du gouvernement et de l'opposition afin de soutenir les positions du travail.
    Ces campagnes incluaient des efforts continuels pour persuader le parlement d'harmoniser les lois restreignant l'activité unioniste avec les  conventions de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) compétentes. Une "marche au parlement" a été empêchée le 24 mars  par la police , qui accusait la Turk-Is de ne pas avoir demandé de permission pour la manifestation.
    Une décision de la cour de 1986 a ordonné la fermeture permanente de la DISK (Confédération des Syndicats Révolutionnaires), dont les activités avaient été suspendues sous la loi martiale suite au coup d'état militaire de 1980. Le procès est au stade de l'appel. L'organisation et ses fonds restent sous le contrôle de curateurs désignés par la cour. Trois anciens leaders de la DISK ont été élus au parlement en novembre. Les procès de l'Association pour la Paix sont aussi allés en appel, et 11 inculpés ont été libérés sous caution.
    Les représentants du gouvernement turc, des syndicats et des employeurs participent pleinement aux activités d de l'OIT. La plus importante confédération, TURK-IS, est affiliée à l'ICFTU. La plupart des syndicats de la TURK-IS sont affiliés à leurs secrétariats syndicaux internationaux respectifs.
    Le gouvernement de Turquie a été élu comme membre de l'organe dirigeant de l'ILO en 1987.
    La fédération américaine du travail et le congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) ont affirmé que le droit constitutionnel des travailleurs turcs à s'organiser est entravé par le code du travail et par les décisions et les pratiques du gouvernement et des employeurs, que le droit de grève est gravement entravé, et que l'observation des standards minimaux de santé et sécurité est relâchée. Le ministre du travail a annoncé que le gouvernement prépare une législation qui répondra à certains problèmes concernant les droits des travailleurs soulevés par la AFL-CIO et d'autres. La nouvelle législation , d'après les rapports, modifiera ou éliminera certaines restrictions concernant les syndicats, le contrôle gouvernemental excessif sur les syndicats, et les règlements affectant le libre choix de leurs fonctionnaires. La nouvelle législation concernerait également le droit pour les fonctionnaires civils et les professeurs de s'organiser, ainsi que les conditions strictes qu'un syndicat doit remplir actuellement pour pouvoir devenir un organe de négociation.
    C. Liberté religieuse
    La grande majorité des Turcs sont des musulmans sunnites. Les "Alevis", qui adhèrent à différentes formes du chiisme, constituent 10 à 15 % de la population. Il y a aussi quelques groupes variés de religion chrétienne, et une petit communauté juive.
    Le gouvernement turc, depuis la fondation de la république , a considéré la laïcité comme un attribut essentiel d'un système démocratique moderne de type occidental, et la constitution proclame que c'est une caractéristique fondamentale de l'Etat. Il distingue soigneusement en conséquence entre le droit privé d'une personne à la "liberté de conscience, de croyance religieuse, et de conviction" et le prosélytisme de quelque forme que ce soit. Depuis l'époque ottomane, l'identité personnelle  dans la société turque a été corrélée avec la religion. Le traité de Lausanne de 1923 définit les minorités d'après la religion, et l'identité personnelle est encore largement synonyme avec l'identité religieuse même dans le moderne état turc laïc. Le prosélytisme est donc politiquement sensible.
    D'après la constitution, l'instruction de la culture religieuse et de l'éducation morale est obligatoire pour tous les étudiants. Le ministère de l'éducation a confirmé en 1986 que les non musulmans devraient assister aux cours d'instruction religieuse générale mais seraient excusés des sections "pratiques", qui incluent la mémorisation de verset coranique et l'apprentissage de la prière. Les cours --2 heurs par semaine-- sont enseignés par des enseignants laïcs. Des cours coraniques hors programme, utilisant des textes approuvés par le gouvernement, sont autorisés. Le gouvernement  a fermé les cours coraniques organisés par des sectes intégristes enseignant une version plus radicale de l'Islam.
    Parmi les autres groupes religieux, on trouve en Turquie , particulièrement à Istanbul, un petit  nombre d'Arméniens orthodoxes et d'Arméniens catholiques, des Grecs orthodoxes et des Grecs catholiques; des Orthodoxes bulgares, des Catholiques romains, des Chrétiens syriens et assyriens, des Uniates chaldéens, des Protestants et des Juifs. Outre la constitution turque, le traité de Lausanne garantit les droits des minorités non musulmanes. Ces groupes se réunissent dans des églises, des monastères, des synagogues, des écoles (où on peut enseigner aux élèves dans leur propre langue), et dans des fondations religieuses caritatives tels qu'hôpitaux et orphelinats.
    Les groupes de la minorité non musulmane se sont plaints de façon répétée des méthodes et des mesures du gouvernement concernant les activités des écoles de ces communautés, la formation de conseils paroissiaux, ainsi que l'enregistrement et l'entretien des biens de l'église. Les contraintes imposées par le gouvernement sur le transfert de propriété à des organisations caritatives religieuses est aussi matière à contentieux.
    Le gouvernement a pris récemment des mesures pour résoudre plusieurs problèmes concernant les groupes non musulmans. Il a donné, en avril 1987, la permission au patriarcat grec orthodoxe de reconstruire ses bâtiments administratifs, détruits par le feu en 1941. Il a augmenté le montant des réparations qui peuvent être faites sans autorisation préalable pour des monuments historiques, supprimant par là un autre sujet de contentieux. Il a autorisé la libre circulation de bibles. Cependant, il n'a pas encore accordé la permission de construire des églises à certaines communautés telles que les uniates chaldéens qui ont émigré du sud-est vers Istanbul, ou à la communauté arménienne d'Ankara.
    D. Liberté de mouvement à l'intérieur du pays,
    voyages à l'étranger, émigration et rapatriement:
    Il existe une liberté de mouvement générale en Turquie. Les Turcs sont généralement libres de voyager à l'étranger, et un nombre croissant d'entre eux l'ont fait, étant donné le relâchement des contrôles. D'après la constitution, la liberté d'un citoyen de quitter le pays peut être restreinte sur base de la situation économique, d'obligations civiles (en général le service militaire), ou d'enquêtes et de poursuites criminelles. Certains Turcs impliqués dans des procès de masse  prolongés datant du début des années 1980 n'ont pu obtenir de passeports, alors qu'ils ont été accordés pour d'autres, et il existe des preuves que certains citoyens non inculpés n'ont pu obtenir de passeport pour des raisons politiques. La loi turque garantit que ceux auxquels les passeports ont été refusés à cause d'une inculpation peuvent néanmoins être autorisés à voyager si le ministère de la justice et le cabinet du premier ministre l'approuvent. Des restrictions ont été atténuées dans la pratique, et le gouvernement est en train de considérer des modifications législatives en vue de rendre la politique turque sur les passeports plus conformes avec les normes européennes.
    La loi turque garantit aux citoyens la protection contre la déportation, l'extradition, ou le refus du retour au pays. La constitution assure le droit de retourner chez eux aux Turcs vivant à l'étranger. Dans le cadre des mesures de la loi sur la citoyenneté turque, cependant, le gouvernement  peut retirer cette citoyenneté à ceux qui ont refusé de rentrer au pays pour faire face à des accusations criminelles, ou qui ont commit des actes par lesquels ils se sont eux-mêmes expatriés, comme le fait de ne pas rentrer pour accomplir son service militaire. D'après un rapport de presse turc d'avril, 13.788 turcs vivant à l'étranger ont été privés de leur citoyenneté depuis 1980.
    La Turquie a accueilli de façon permanente environ 4.500 réfugiés afghans d'ethnie turque au cours des dernières années et fournit un asile temporaire aux réfugiés est-européens dans deux camps provisoires. Comme la Turquie limite la définition de réfugié aux Européens de l'est, le gouvernement n'accorde pas le statut de réfugiés aux Iraniens. Néanmoins, en tant que premier pays d'accueil, la Turquie sert d'asile pour de nombreux réfugiés iraniens en cours de réinstallation par la Haute Commission des Nation Unies pour les Réfugiés (UNCHR). Elle ne déporte généralement pas en Iran ceux qui sont entrés en Turquie illégalement ou qui ont dépassé leur délai de séjour comme "touristes". En conséquence, un grand nombre d'Iraniens vivent actuellement en Turquie, parmi lesquels beaucoup à Istanbul et dans d'autres grandes villes.

    Section 3

    Respect des droits politiques: le droit des citoyens à changer leur gouvernement:

    Le droit à changer le gouvernement existe à la fois en théorie et dans la pratique. La Turquie a un système parlementaire présidentiel multiparti. Le président est élu par le parlement pour une période de 7 ans. Le président actuel, dont l'élection était automatique par l'approbation de la nouvelle constitution turque par le référendum de 1982, est l'ex-général Kenan Evren, ancien chef de l'Etat major de Turquie et chef du Conseil de la Sûreté Nationale qui a gouverné la Turquie pendant la période de juridiction militaire (1980-83).
    Les élections pour les postes publiques se font sur base du suffrage universel. Le parlement constitué d'une chambre comprend 450 sièges élus sur base proportionnelle. La loi d'élection oblige un parti a gagner au moins 10 % du scrutin national total pour obtenir de sièges au parlement. Cette barre des 10 % a pour but d'empêcher la fragmentation politique et la retour à la paralysie parlementaire de la fin des années 70. Sur les sept partis légaux qui  ont présentaient des candidats pour les élections nationales de novembre, trois ont obtenu plus de 10 % du total des votes.
    Les partis défendant un état théocratique, la supériorité ou dictateur d'une classe ou d'un groupe social particulier, ou des philosophies "exclusives" ou "élitistes" sont interdits.
    Aucun parti ne peut se former autour d'un groupe ethnique ou culturel. Parmi les groupements politiques interdit, on trouve les communistes et autres partis marxistes, qui sont basés sur les classes sociales, et les partis "élitistes" fascistes. Ceux-ci sont considérés comme ennemis d'une démocratie de type occidental et constituant une menace pour l'intégrité fondamentale de la Turquie. Les fascistes et les communistes sont de la même façon empêchés d'être membres d'autres partis. Les membres des forces armées et de certaines catégories de fonctionnaires civils ne peuvent joindre un parti politique.
    La constitution garantit des droits politiques égaux pour les hommes et les femmes. La Turquie fut l'un des premier pays à accorder aux femmes des droits  politiques intégraux et égaux. Il y a actuellement 11 membres féminins du parlement, dont l'une est ministre de cabinet, et plusieurs femmes tiennent des postes importants dans la hiérarchie des partis. Les membres de minorités, musulmans ou non musulmans, n'encourent aucune limitation légale de leur participation politique tant qu'ils acceptent l'identité nationale turque. Malgré d'autre limitations et restrictions concernant les Kurdes en tant que groupe ethnique, beaucoup de Turcs d'origine kurde servent ou ont servi au parlement, au cabinet et aux postes gouvernementaux de haut rang.

    Section 4

    Attitude du gouvernement concernant les enquêtes  internationales
    et non gouvernementales sur les accusations de violations des droits de l'homme:

    Le gouvernement a autorisé les visites étrangères en Turquie dans le but de discuter des droits de l'homme en 1987 et , dans la plupart des cas, a facilité les contacts aussi bien aux visiteurs officiels que non officiels. Le gouvernement a été moins coopératif pour les visiteurs enquêtant sur la question kurde. Depuis l'envoi en 1983 d'une plainte de cinq nations devant la Commission européenne des droits de l'homme, la Turquie a commencé à fournir des rapports confidentiels au Conseil de l'Europe et à permettre des visites sur le terrain. Le gouvernement n'a pas permis les visites du Comité international de la croix rouge. L'accession de la Turquie à la Convention sur la Torture au Conseil  de l'Europe impliquera des visites du comité international de la CE dans le futur.
    Une association non gouvernementale des  droits de l'homme  a été formée à titre provisoire en juillet 1986 et a vu son programme officiellement approuvé en 1987. Le Parti populiste social démocrate, principal parti d'opposition, a également un comité des droits de l'homme et a activement discuté des questions des droits de l'homme au parlement.

    Section 5

    Discrimination sur base de race, de sexe, de religion, de langue ou de statut social:

    La constitution considère tous le citoyens turcs comme égaux et interdit la discrimination sur base ethnique. Par le traité de Lausanne, le gouvernement a entrepris "d'assurer une pleine et complète protection de la vie et de la liberté à tous les habitants de Turquie sans distinction de naissance, de nationalité, de langue, de race ou de religion." En même temps, la politique du gouvernement turc a constamment été de favoriser l'assimilation des personnes de culture non-turque dans le courant principal de la société. La taille des communautés minoritaires non musulmanes a décliné constamment au cours des ans.
    Les groupes minoritaires non musulmanes continuent de se plaindre de la nature contraignante de la politique et des  procédures réglant l'organisation des biens des églises, et les activités des conseil paroissiaux. Le rejet des requêtes  de la plupart des organisations religieuses caritatives reste toujours une préoccupation majeur.
    On trouve des Kurdes dans toute la Turquie, aussi bien comme résultat de la politique de peuplement des Ottomans que de récentes migrations vers les centres urbains. Ceux qui vivent en dehors de la partie sud-est du pays ont été assimilés plus complètement dans la vie nationale. La plupart des personnes de langue kurde se trouvent concentrées dans le sud-est économiquement désavantagé, et beaucoup mènent une existence tribale. Au travers des programmes de développement économique de grande envergure, le gouvernement cherche à intégrer pleinement aussi bien la région que sa population dans la Turquie moderne.
    Le gouvernement reste fermement opposé à toute reconnaissance d'une identité ethnique kurde qui pourrait remettre en question l'unité de l'Etat turc. La publication de livres, journaux, et autres matériaux en kurde est interdite, de même que celle de livres ou autres écrits traitant de l'histoire, de la culture ou de l'identité ethnique kurde. La langue kurde est interdite pour des buts officiels, c'est à dire dans les cours de justice, et il en va de même dans certaines situations privées telles que le fait de recevoir des visiteurs en prison, même si le prisonnier ou le visiteur ne parle pas le turc. Néanmoins, il n'y a aucune restriction quant à l'usage du kurde dans des établissements non-officiels.
    Comme indiqué plus haut, le droit des groupes indigènes minoritaires à utiliser leurs propres langues est limité. Bien que le traité de Lausanne établit qu'aucune restriction ne sera imposée sur l'usage libre pour tout ressortissant turc de n'importe quelle langue dans la communication privée, dans le commerce, la religion, dans la presse ou dans les publications de quelque sorte que ce soit ou lors de rassemblements publics," la constitution déclare que la langue officielle  du pays est turque. Un article de la constitution interdit la discrimination sur base de langue, et d'autres articles interdisent l'usage public d'une "langue interdite par la loi". Bien qu'aucune législation ne définisse les langues interdites, les lois concernant les émissions et les publications définissent quant à elles des "langues légales". Des personnes ont été traduites en procès pour des accusations variées ayant rapport à l'usage du kurde. Tous les procès récents de ce type se sont soldés en acquittements. Le gouvernement a déclaré que le but de ses interdictions sur les publications en kurde (et son action visant à décourager l'usage de langues telles que le géorgien et le laz) est d'élever le turc au rang de langue de tous les citoyens pour tous les usages. Ceci est une part de l'effort entrepris pour inculquer à tous les citoyens turcs un sens de l'identité avec l'Etat et la nation turque, au lieu  de l'identification avec un groupe particulier à l'intérieur de la nation. En pratique, la sévérité des restrictions sur l'usage d'une langue minoritaire paraît dépendre de la perception d'une menace que représente le groupe en question pour
l'intégrité de l'Etat. Par exemple, le gouvernement doit faire face aux séparatistes kurdes armés et pense que l'usage du kurde pousse au séparatisme. L'usage de l'arabe, à propos duquel il n'existe pas de telles préoccupations, n'est pas restreint de  cette  façon.
    Le gouvernement a longtemps été à la pointe du progrès dans la promotion et la protection des droits de la femme. Les femmes ont le droit de vote intégral et le droit à l'éducation, sont arrivées à un haut degré de réussite, et sont représentées dans toutes les professions et institutions. Les femmes ont servi ou sont actuellement employées à des postes de rang élevé tels que recteur et doyen d'université, ambassadeur, président d'un parti politique, et colonel d'armée. Les femmes d'affaires turques jouent un rôle significatif dans de nombreuses industries et sont représentées dans les équipes dirigeantes de certaines des plus grandes firmes privées de Turquie. Les femmes avocats et juges sont proportionnellement plus répandues qu'aux Etats Unis, et les femmes médecins sont dominantes dans certaines spécialités.
    Néanmoins, le rôle des femmes dans les petites communautés et les régions rurales --spécialement dans l'est du pays-- est encore circonscrit par des siècles de tradition patriarcale. Les contraintes sociales et culturelles dans ces régions limitent l'accès égal des femmes aux structures éducationnelles et professionnelles, en dépit de la constitution et du code de lois.

    Conditions de travail

     La constitution garantit le droit à des conditions de travail raisonnables, adapté à l'âge, au sexe et aux capacités du travailleur, et garantit le droit au repos, aux loisirs et à un salaire suffisant. La loi sur le travail interdit l'emploi d'enfants en dessous de 13 ans et restreint l'emploi des enfants en dessous de 15 ans à des "tâches légères qui n'entravent pas leur santé et leur développement physique, n'empêchent pas leur participation aux occupations de formation et aux programmes d'orientation, ou la possibilité pour eux de bénéficier de l'éducation." Les enfants entre 15 ans et 18 ans ne peuvent être employés dans le travail souterrain ou sous l'eau et, ne peuvent être employés la nuit. Les filles et les femmes ne peuvent être employées dans des travaux sous terre ou sous eau, mais si elles ont plus de 18 ans, peuvent travailler de nuit sous des conditions spécifiés conjointement par le ministère de la santé et du bien-être et le ministère de l'industrie et du commerce.
    Une équipe composée de représentants du gouvernement, du secteur privé et du travail établit les salaires minima nationaux dans les secteurs de l'agriculture et dans les autres secteurs. La loi sur le travail impose une journée de travail de 7 heures  et demie et une semaine de 45 heures.
    En dépit des garanties constitutionnelles, des spécifications légales, et des efforts des syndicats, un fossé considérable persiste entre les idéaux et les réalités au niveau de la santé et de la sécurité du travail. Les syndicats se sont plaints à de nombreuses reprises du fait que les règlements existant qui concernent la santé, la sécurité et les conditions de travail ne sont pas suffisamment mises en application. En dehors du secteur industriel où les unions exercent une influence considérable, les restrictions légales sont généralement ignorées aussi bien en ce qui concerne la santé  et la sécurité que pour l'emploi des enfants et des femmes. D'une façon générale, la différence entre les interdictions légales sur le travail des enfants et leur mise en pratique est en diminution. Mais dans le secteur de l'agriculture sur une large échelle, et à moindre échelle dans les entreprises commerciales familiales, les jeunes enfants travaillent toujours aux côtés de leurs parents. Au cours de l'année 1987 un marché illégal pour l'emploi d'enfants dans une ville de province, où les enfants des villages étaient loués à des personnes extérieures à la famille pour travailler pendant les mois de vacances, a reçu une attention considérable de la presse et a été immédiatement fermé par le gouvernement.

SUR LA HERITAGE FOUNDATION
    Dans le numéro de  ddécembre 1988 d'Info-Türk, nous avions reproduit un rapport de la Heritage Foundation demandant à l'administration Reagan d'accroître son soutien à l'administration Özal en Turquie.
    D'après le New Statesman du 29 mai 1987, la Heritage Foudation apppuie le courant de pensée le plus influent et le plus à droite des Etats-Unis. Elle a fait  parvenir un million de dollars au cours des cinq des dernières années à des organisations de droite en Angleterre et , dans une moindre mesure, à d'autres pays ouest  européens. L'argent a été donné avec l'objectif  ouvert d'influencer la politique intérieure du Royaume Uni," dit le mensuel brittanique.
    "Heritage, financé principalement par Joseph Coors, un magnat de la bière et idéologue de droite, tente actuellement  de former le noyau d'une 'internationale conservatrice'. Déjà plus proche du président Reagan qu'aucun autre  centre similaire, Heritage dispose maintenant des contacts et des fonds nécessaires pour mettre en oeuvre ses programmes, qu'elle définit comme ayant pour but 'de faire entendre les voix du conservatisme responsable à Washinngton, D.C...et dans la capitale du monde'.
    "Les activités internationales d'Heritage ont été favorisées par leurs entrées faciles dans les milieux de l'administration Reagan. En 1982, le président Reagan a désigné le président de l'Heritage Foundation Edwin J. Feulner junior  comme président de la commission  consultative  sur la Diplomatie Publique, qui évalue les programmes de l'USIA, organisme qui inclut la Voice of Americca, Radio Marti, Fullbright scholarships et la National Endowment for Democracy.
    "Les projets soutenus  par Heritage sont devenus plus systématiques en 1982, quand les conservateurs américains et anglais s'alarmèrent devant l'influence grandissante du mouvement pacifiste. En mai de cette année Heritage a fait circuler un 'Arrière-plan' sur 'Moscou et l'offensive pacifiste', dans lequel elle appelait l'OTAN et 'ses organisations affilliées publiques de soutien' à répandre l'information concernant les liens... entre les groupes connus du front cummunistes et les groupes pacifistes 'indépendants'.
    "Dans une interview avec Inter-Nation le vice-président de l'Heritage Foundation Burton Yale Pines prédisait: 'peut-être que la prochaine étape sera la constitution d'une sorte d'internationale conservatrice.' Il sugérait que cela puisse prendre la forme d'une alliance de pas moins de 20 groupements de même tendance aux Etats-Unis, en Angleterre, en France, en Allemagne de l'ouest, au Japon et dans d'autres pays. Au cours des six dernières années, la Heritage Foundation a été une force d'appoint majeure pour la 'révolution reaganienne'. L'administration Reagan elle-même viendra à son terme en 1988. Heritage essaye au mieux, cependant, d'assurer que les principes du reaganismes continuent de  régir la politique, bien au-delà des frontières des Etats Unis."